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Alès : gaz de schiste, "les gains sont surévalués"
mercredi 18 septembre 2013
ALÈS : GAZ DE SCHISTE, "LES GAINS SONT SURÉVALUÉS"
Article d’Adrien Boudet paru dans Le Midi Libre du 18/09/2013
Lire l’article sur le site du Midi Libre
Thomas Porcher, docteur en économie, est invité demain des Jeudis du député à l’initiative de Fabrice Verdier.
Il remet en cause l’évaluation des recettes à propos d’une éventuelle exploitation du gaz de schiste.
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Vous êtes l’auteur du “Mirage des gaz de schiste” (1) et serez demain à Alès salle du Capitole (18 h 30) pour une réunion publique. Pourquoi parlez-vous de mirage ?
D’abord, on nous fait croire que l’exploitation de gaz de schiste créerait beaucoup d’emplois, en comparant aux États-Unis. Là-bas, on parle de 600 000 emplois directs ou indirects dus à la production de gaz. Mais il faut remettre en perspective avec le nombre de puits forés : sur tout le territoire, il y en a 500 000 ! Donc, en gros, il y a un emploi par puits créé. Et les puits aux États-Unis sont forés de manière intensive. Si on voulait arriver à quelque chose de comparable, il faudrait forer énormément.
Par exemple, qu’est-ce que ça représenterait sur la surface du permis “bassin d’Alès” ?
Au Royaume-Uni, où ils se lancent dans le gaz de schiste, il y a 3 000 puits de prévus pour certains villages. Dans le secteur d’Alès, il faudrait alors plusieurs dizaines de milliers de puits... avec tout ce que ça implique. Selon une étude du National bureau of economic research américain, aux États-Unis, un seul puits ferait baisser les prix immobiliers de 24 % dans un rayon de 2 000 mètres. Quant à la santé, une étude universitaire du Colorado (menée par Lisa Mc Kenzie, NDLR) montre que dans un rayon d’un demi miles à proximité d’un puits de gaz de schiste, on a plus de chance de développer un cancer.
Le prix du gaz peut-il diminuer si on exploite le gaz de schiste ?
Ce n’est pas du tout sûr car le marché du gaz en Europe ne fonctionne pas de la même façon. Le gaz est indexé sur le prix du pétrole en Europe, rien n’indique donc que le prix du gaz baisse.
L’exploitation de gaz de schiste peut-elle apporter de l’indépendance énergétique ?
En France, c’est illusoire et impossible. Même avec un forage intensif, au niveau européen, on peut arriver tout au plus à ce que le gaz de schiste représente 15 à 20 % de notre consommation de gaz.
Arnaud de Montebourg avait évoqué la possibilité d’exploiter le gaz de houille. Qu’en pensez-vous ?
Si on ne l’a pas exploité avant, ça veut bien dire ce que ça veut dire. Ce sont des énergies difficiles à extraire pour pas grand chose. Et puis, pour le gaz de schiste comme pour le gaz de houille, je crois qu’il faut aussi voir une chose. Ici, vous êtes dans une région touristique. Si Montebourg vivait dans le Gard, il n’aurait sans doute pas la même position.
Pensez-vous que la France exploitera un jour le gaz de schiste ?
Avec la Bulgarie, la France est le seul pays qui a interdit l’exploration et l’exploitation de façon ferme. Le président Hollande a l’air de tenir bon là-dessus même s’il y a des divergences dans son gouvernement. Après, ça peut changer, il y a des pour ou des contre à droite comme à gauche... Je crois qu’on ne doit pas avoir un comportement moutonnier vis-à-vis des États-Unis. Les gains sont surévalués et il faut se lancer dans les quinze prochaines années dans la transition énergétique.